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Micheline

Quand Micheline est entrée dans la salle où j’allais faire une dédicace de Momig, elle m’a dit « Je suis curieuse de vous écouter, j’ai lu tout ce qui vous concernait sur internet ». Son sourire et ses yeux grands ouverts m’ont tout de suite donné confiance. Le lendemain, nous dînions chez elle…


Il court, il court le furet
Le furet du bois, Madame
Il court, il court le furet…

Micheline court
Et comme le furet
Elle met son nez partout
Curieuse
Elle monte et elle descend
Entrant par une porte elle ressort par une autre
« Vous avez vu mes sculptures ?
Ce n’est pas terminé, vous savez, j’ai tant et tant à faire »
Je n’ai pas le temps de répondre, Micheline est repartie
C’est dommage, c’est si beau.

Micheline telle une locomotive
Fonce aux quatre coins de la planète
Partout où il y a des mers, elle veut voir et témoigner
Elle sculpte comme une journaliste
Avec l’œil de l’artiste elle attire notre attention

Regardez c’est beau, c’est la mer, notre mer
Pleine de poubelles, couverte de mazout
Et puis vide, si vide, où sont donc passés les poissons ?
Regardez, c’est beau, c’est notre mer à nous
Les humains ?

Micheline repart à la cuisine puis tout en haut de sa grange
Elle nous a fait du poisson, il en restait donc un
Et des tonnes de douceurs
C’est bon ? Vous ne vous ennuyez pas ? Qui veut chanter ?
Elle a peur que tout ne soit pas parfait
Elle voudrait tant que tout fut parfait
Elle fait tout pour que tout soit parfait
Heureusement, ça ne l’est pas
Parfait

Micheline travaille le verre
Envers et contre tout
Elle transforme les pots antirides en bateaux de rêve
Les éprouvettes en étoiles de mer
Les cul de bouteille en algues marines
Mais comment fait-elle ? se demande-t-on à Murano
Elle fond et recycle
Et parle à travers son prisme
Son verre déformé confirme la réalité
Elle voudrait tant
Que les oiseaux cessent d’être mazoutés
Que les fonds marins cessent d’être maculés
Que l’argent serve à ce pourquoi il est simplement fait : échanger

Micheline
Quand elle est bateau, vogue sur des mers propres
Océans de cartons ou de rideaux bleus
Ses filaments marins semblent vivants et nous invitent au voyage
Quand elle est tour, elle penche à droite ou à gauche, peu importe
Ses Babel nous rappellent que nous pourrions tous être frères
Et parler une même langue, celle du cœur
Sculpter est aujourd’hui sa plume
Patiemment

Elle recouvre ses fonds marins
De métal argenté
Est-ce la place de l’argent ?
Elle habille ses oiseaux de noir
De la tête au pied
Pourquoi tant de deuils sous les flots bleus ?
Sa mise en scène est un voyage
Où que vous alliez, c’est beau
Comme notre planète bleue
Qui regorge de bouteilles jetées à pleins fourgons
Sans un seul mot dedans
Et pourtant
Il est plus que temps
D’en écrire au moins un
Dans chacune d’entre elles
SOS


Micheline devant sa maison dans le Berry

Une enfance sous la grisaille d’une banlieue parisienne. Il n’en faut pas plus pour créer un besoin irrépressible d’un au-delà des frontières, coloré, vivant, luxuriant, inattendu. Voyages aux Antilles, Vénézuela, Guyane, Afrique noire, Madagascar…, un an sur un voilier, divers métiers du journalisme, graphiste, formatrice aux logiciels d’édition…

Et après tous ces longs chemins de traverse, je suis revenue vers la création, non plus la peinture, mais la sculpture et un matériau privilégié, le verre, découvert en 1990. L’utilisation d’un four à 1000° dans une chambre avec moquette au 2è étage d’un immeuble parisien, entraîne rapidement la recherche d’un atelier quelque part au hasard, et ce sera le Berry. Travail dans l’isolement de la campagne, puis à partir de 2001, participation à des concours internationaux, à des expositions en groupe et en solo. Il m’est toujours apparu plus facile de commencer une nouvelle activité dans un pays étranger – le Japon d’abord, plusieurs pays européens ensuite- pour revenir ensuite en France et finalement, tout près de chez soi, comme aujourd’hui. En somme, la boucle serait-elle bouclée ?

Pour en savoir plus sur le travail de Micheline : http://www.micheline-domancich.com/

2 Réponses
  • Evelyne Cherbit
    mai 23, 2017

    Micheline,

    Comme vous portez bien votre nom !

    Votre locomotive est lancée depuis longtemps.
    Vous foncez, tout en prenant soin de ne pas rater une goutte du paysage.
    Vous défilez, non pas sur des podiums longilignes, mais à travers la nature offerte, dans votre carapace d’acier. Vous sifflez, vous essoufflez dans les côtes, passez sous les tunnels, sifflez et suez, avancez, triomphante, colossale.
    Rien ne vous résiste.
    Votre rêve ?
    Aller à la rencontre des coraux.
    Quoi de plus logique pour une locomotive ?
    Libérer son âme de papillon suivant un chemin de fer qui s’enfonce dans la mer.
    Pour ma part, j’avais longtemps plongé en scaphandre.
    Votre façon de voyager m’interpelle, maintenant que j’ai ôté mon appareillage.
    Merci à vous Micheline pour votre ivresse,
    Merci à Isabelle pour ces profondeurs.

    • Momig
      juin 3, 2017

      Il n’y a rien de plus contagieux que l’énergie : merci Evelyne de nous faire profiter de la vôtre en retour. Pour passer un joli moment dans l’univers de Micheline à partir du 25 juin : exposition au centre de la France

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